
Cette chronique concerne l’objet “catalogue d’exposition” : A STATE OF MIND de Martino Gamper à la serpentine Gallerie du 5 mars au 18 mai 2014. Publié par Koenig Books. Mis en page par Abäke et Alex Rich (qui ont participé à l’élaboration du principe de l’exposition avec Martino Gamper)
Cet objet m’a interpellé lorsque dérivant parmi les rayon de la librairie qui se situe juste au dessus de nous[1], je suis tombé dessus.
Je souhaite parler du catalogue, tout d’abord parce que je n’ai pas eu la chance de voir l’exposition. Il est difficile de voir toutes les expositions. J’attends avec impatience la mise en place de la téléportation gratuite pour tous.
On connaît les relations étroites qu’il existe entre l’exposition et le catalogue. La dimension éphémère de l’exposition, que le catalogue porte dans la durée etc. On a tous déjà vu ces expositions prétextes à publier un catalogue, et vice versa.
Dans le cas qui nous intéresse, le catalogue est un objet à la fois autonome et complémentaire à l’exposition, un projet de design réfléchi et à mon sens réussi qui dépasse largement les relations de redondances, travers récurent de l’exercice, du catalogue “trace” à l’exposition “résumé/synthèse en espace” du catalogue.

Le catalogue à exactement le même format, et une facture quasi identique à la réédition de l’ouvrage Auto-projetazionne d’Enzo Mari aux éditions Coraini.




Il s’agit du catalogue de l’exposition d’une quarantaine d’étagères, présentées détourées, imprimées en une seule couleur : le bronze. L’étagère est un objet, en soit, finalement assez ingrat et peu spectaculaire. C’est une typologie de mobilier qui est souvent envisagée de manière “immobilière”, construite sur mesure dans son appartement). Imaginer 40 étagères disposées dans un musée n’est pas le pitch le plus accrocheur qu’il soit pour une exposition.
Mais
Soudain, Martino Gamper opère un basculement vers un dispositif curatorial d’exposition collective. Il propose à un groupe de personnes (Adam Hills, Andreas Schmid, Andrew McDonagh, Andrew Stafford, Bethan Wood, Charles Dillon, Daniel Eatock, Enzo Mari, Ernst Gamperl, Fabien Cappello, Fiona Raby, Gemma Holt, Jane Dillon, Jason Evans, Jurgen Bey, Karl Fritsch, Maki Suzuki, Marc Newson, Mats Theselius, Max Lamb, Michael Anastassiades, Michael Marriott, Oiva Toikka, Paul Neale, Richard Wentworth, Ron Arad, Rupert Blanchard, Sebastian Bergne, Simon Prosser, Tonny Dunne, Troika), majoritairement des amis et collègues, de présenter tout ou partie de leur collection d’objets personnels… Chaque étagère devient un micro espace d’exposition personnel, qui participe d’un ensemble cohérent qui raconte assez judicieusement ce que peuvent être les inspirations (ou obsessions) de certains de nos confrères designers.
Les séries d’objets sont photographiés sur fond vert, prêts à être incrustés dans les étagères… Au lecteur d’imaginer la manière de disposer chaque série d’objets dans la dite étagère.









J’ai rajouté 2/3 images trouvées sur le site de la Serpentine afin de pouvoir apprécier les résultats potentiels.



Les cubes de verre de Oiva Toikka / Franco Albini
Les contenants de Ernst Gamperl / Martino Gamper
La collection de verres de Daniel Eatock / L’étagère murale d’Andrea Branzi
On retrouve parfaitement ce qui caractérise, selon moi, la position de Martino Gamper et comment il navigue habilement sur cette frontière entre art et design.
Une exposition qui parle de design, de son histoire, de ses acteurs, leurs aspirations, leurs influences… Abordé d’un point de vu singulier, qui ne fait pas pâle figure au milieu de cette vague, disons déferlente curatoriale qui innonde toute une frange de l’art contemporain. (On voit des expos collectives d’art contemporain où seul le curateur est cité… même plus les artistes qui produisent…) Une exposition de design a sa place dans un musée.
[1] NDLR : design au banc #24 se déroulait dans la petite sale du centre pompidou, juste l’étage au dessous de la librairie Flammarion.